Supply Chain Management : la Blockchain est-elle la nouvelle RFID?
Rapide retour en arrière, aux alentours de l’année 2006, le monde de la Supply Chain était en effervescence avec l’explosion des applications RFID (Radio Frequency IDentification). Partant d’une technologie apparue au milieu du 20e siècle, les développeurs de solutions ont commencé à travailler sur des systèmes de traçabilité à même de faire entrer la Supply Chain dans l’ère du Management 2.0.
RFID : d’un sujet à la mode à une approche plus pragmatique
Chaque secteur du marché, chaque acteur de la chaîne, chaque fonction de l’entreprise utiliserait bientôt la RFID afin d’améliorer sa performance logistique (le bon produit, le bon prix, la bonne quantité, le bon endroit, le bon moment). Répondant à un besoin croissant de traçabilité et de maîtrise de la chaîne d’information, cette technologie a suscité l’intérêt auprès d’un large public de professionnels.
Les salons et la presse spécialisée ont abondamment relayé l’information via des conférences, des tables rondes et des articles. La limite de l’exercice était tout de même marquée par le peu d’exemples concrets d’application et la difficulté à définir un cadre précis d’arbitrage (quels besoins/quelles solutions). Sans compter qu’un sujet éthique s’inviterait bientôt dans le débat autour de questions sur le respect de la sphère privée – où commence et où s’arrête la traçabilité – et de l’environnement – la blockchain n’étant pas la plus ecofriendly des technologies par la data qu’elle génère.
Avec un peu de recul nous pouvons constater que la révolution annoncée a été contenue, les codes-barres forment encore la solution la plus répandue pour suivre les produits dans la Supply Chain. Face à une technologie désormais plus mature, nous pouvons souligner les besoins et contraintes qui maximisent la valeur ajoutée de cette solution. Le secteur textile, les sous-ensembles à forte valeur ajoutée dans l’industrie, les unités de manutention en boucles fermées, voici quelques modèles d’application réussie pour la RFID.
Block Chain : vous ne comprenez rien à la Supply Chain 1.0?
Essayez la Supply Chain 4.0!
10 ans après, la RFID n’est plus un sujet tendance et de nouveaux concepts tiennent la vedette dans les débats des experts métier. Sur l’axe technologique, le plus présent aujourd’hui est sûrement le développement de la Block Chain, un sujet lui aussi en lien avec la maîtrise de l’information mais sur un axe désormais plus global (on pense ici au big data). Travaillé à la base pour sécuriser des transactions financières, le protocole Blockchain ouvre un vaste champ d’applications.
Les deux avantages principaux d’ores et déjà identifiés
1/ Le haut niveau de sécurité garanti
2/ la capacité de diviser la tache de traitement des données entre plusieurs terminaux (éliminant de fait les besoins en serveurs coûteux et sensibles).
Chaque appareil imbriqué dans la chaîne est sollicité afin de stocker une partie de l’information globale et sert à contre valider l’authenticité des données stockées par ses pairs. Le système s’avère parfait pour sécuriser les transactions financières et c’était le point essentiel pour Bitcoin qui est à l’origine du développement de ce nouveau protocole.
Au fil du temps, de plus en plus de voix s’élèvent soulignant tout le potentiel que la Blockchain représente bien au-delà des frontières pour lesquels elle a été créée. Participant à la dernière édition de Supply Chain Event à Paris, j’ai pu constater que cette technologie devenait un sujet de premier plan avec une matinée entière de conférences dédiées.
Le Supply Chain Management entrant peu à peu dans l’ère du 4.0, la Blockchain est le concept idéal à mettre sur le devant de la scène. Mais tout comme pour la RFID plus tôt, il n’y a pas d’exemple concret d’application pour nos métiers de la logistique (entreposage, transport, appros…).
L’idée serait fort intéressante si nos Supply Chains étaient déjà matures sur les axes 2.0 et 3.0 (quelqu’un a-t-il une idée de la différence entre les deux ?). Mais 90% des Managers Supply Chain sont, au quotidien, noyés par la seule exécution des basiques qui leur permettraient d’avoir un bon niveau de performance opérationnelle. Aussi loin que la conceptualisation puisse aller, et autant qu’elle alimente la vie des experts, les entreprises se battent toujours afin de structurer et de faire travailler ensemble les différents processus logistiques.
Ouverture
On peut facilement imaginer que la Blockchain formera un réel progrès pour certaines opérations, notamment lors des étapes où la Supply Chain s’ouvre sur des contreparties externes (hors transactions financières). Mais la gigantesque quantité de données qu’exige la mise en oeuvre d’une telle technologie pourra apparaître comme contraire aux objectifs de réduction de gaz à effet de serre et dont la sobriété numérique est un des pendants. Répondre par ailleurs, avec assurance que cette technologie s’imposera à court-terme dans le domaine du Supply Chain Management serait sans compter sur ceux pour qui cette dernière constitue de toute façon un mythe.