Schémas directeurs logistiques : de l’internationalisation à la rationalisation
Schémas directeurs logistiques, rappel de contexte et questionnements
En développant des sites industriels aux quatre coins de la planète pour répondre à leurs impératifs stratégiques, les entreprises se sont vues dans l’obligation de mettre en place un ensemble cohérent de processus destinés à former la chaîne de valeur.
Si une mise en œuvre appliquée de cette dernière est indispensable à la bonne tenue des objectifs de performance, elle représente de fait une charge importante par les besoins engendrés : transport, entreposage, fonctions support…
C’est la rançon d’une complexité grandissante : l’internationalisation des grands groupes et la dispersion des actifs industriels sont à conjuguer avec le besoin grandissant de flexibilité et de réactivité exprimé dans toute la chaîne sans pour autant grever la compétitivité.
- En matière de flexibilité : Comment adapter son organisation pour qu’elle soit en capacité de répondre aux variations de la demande : variations des volumes, variations de la nature des produits demandés, modulation de la fréquence de la demande?
- Sur la réactivité : comment se mettre en position de réaliser ces adaptations dans un espace-temps le plus réduit possible?
Les industriels ne sont pas moins exigeants que les consommateurs finaux sur ces deux points.
Les tailles de séries sont réduites, les temps productifs optimisés, les stocks intermédiaires sont ramenés au plus bas niveau possible. Par ricochet, ils exigent tous de la filière logistique un très haut niveau de performance et ce quel que soit le degré d’internationalisation de cette dernière.
Les leviers sollicités pour répondre à l'enjeu de complexité croissante
Cap sur la logistique amont
Après avoir longtemps travaillé sur le périmètre aval et laissé le soin d’optimiser l’amont aux fonctions Achats (optimisation du prix d’achat) et Approvisionnements (sécurisation du taux de service), les directeurs Supply Chain se posent de plus en plus la question des potentiels existants pour la réduction des coûts logistiques amont.
Pour une multinationale ces coûts peuvent représenter sur une année jusqu’à 15% du budget Achats.Ces coûts sont liés aux opérations de transports « door to door », incluant pour certains acteurs des opérations d’entreposage et diverses manutentions.
Des leviers pas foncièrement différents de ce que l’on connait en aval
- Optimisation générale du schéma directeur logistique
- Généralisation du principe de tournées de collecte et mutualisation des ressources employées (camions ou containers)
- Pilotage resserré du taux d’utilisation des ressources (ex : taux de remplissage des containers)
- Alignement des plannings internes sur les temps logistiques standards (ex : répartitions de commandes)
- Rationalisation du panel de prestataires, mise en concurrence et optimisation des termes du contrat (négociations avancées des tarifs par route et par mode, sécurisation de la qualité de service du prestataire, solutions de secours…)
En utilisant les leviers présentés ci-dessus, de grands groupes industriels tels que Fiat ou Valeo ont réussi à dégager pour l’année 2012 des économies comprises entre 7M€ et 20M€.
Ces initiatives sont largement mises en avant dans les communications institutionnelles car elles contribuent directement à l’amélioration de la marge opérationnelle.
La nécessaire reprise en main du flux
La rationalisation du schéma directeur logistique était également au cœur de l’étude que nous avons menée début 2013 pour un des acteurs majeurs du marché des produits de grande consommation très présent dans les pays émergents de la zone Asie Pacifique (5 usines implantées).
L’analyse des flux logistiques amont et des coûts supportés a permis de mettre en avant les opportunités existantes notamment en termes de rationalisation des transports domestiques en provenance des fournisseurs locaux.
L’enjeu ici est de questionner la pertinence des incoterms utilisés dans les contrats. En déléguant l’organisation du transport aux fournisseurs, notre client ne se mettait pas en position de piloter le coût et de lancer des initiatives d’optimisation de la Supply Chain. En reprenant en main de l’organisation du flux logistique, l’ensemble des leviers cités plus haut ont peu ainsi être activés.
Sur un périmètre domestique, mobilisant du transport routier, le passage à un système de tournées et l’utilisation si nécessaire de nœuds de groupage / dégroupage dans le flux amont ont permis une réduction de 50% du cout total de transport.
Adapter l'organisation de la Supply Chain aux enjeux de réactivité et de flexibilité
En complément de la rationalisation des processus il est également bon de questionner l’organisation Supply Chain pour s’assurer qu’elle soit en phase avec les besoins de flexibilité et de réactivité évoqués plus haut.
Lorsqu’un grand groupe industriel s’implante dans un nouveau pays, il a dans un premier temps besoin de piloter le ou les nouveaux sites à partir de ses fonctions centrales afin de garantir la continuité vis-à-vis des standards internes de performance. Selon la culture de l’entreprise la localisation progressive des activités support suit avec plus ou moins d’application, ce qui donne des degrés d’autonomie variés selon les cas.
Un équipementier automobile anglo-saxon de premier plan nous a récemment sollicité en Chine pour rationaliser ses processus Supply-Chain & Achats et revoir le partage des rôles et responsabilités entre les équipes centrales et locales. Au travers de ce cas, nous avons pu mesurer combien la résurgence des organisations historiques centralisées pouvaient handicaper la vie quotidienne des équipes. La complexité des processus décisionnels – faits de constants allez-retours et divers besoins de validation – induit alors un manque cruel de réactivité et pénalise en bout de ligne la Qualité de Service offerte aux clients.
La Supply Chain est en ce sens souvent coincée entre deux mondes. C’est tout particulièrement le cas sur les problématiques de la partie amont évoquée ci-avant.
- Qui pourrait organiser des approvisionnements en juste à temps et des transports en tournées sans avoir la vue opérationnelle de l’usine ?
- En même temps qui pourrait obtenir des économies d’échelle sur les achats ou sur les coûts des prestations sans avoir les données de la demande globale du groupe ?
Nos préconisations
Nous conseillons à nos clients de séparer clairement les processus stratégiques des processus opérationnels puis d’affecter les premiers aux fonctions globales (qui ont une vision générale des besoins groupe) et les seconds aux fonctions locales ou régionales (qui sont en lien direct avec le besoin terrain).
La synchronisation est alors essentielle entre le local et le global, mais l’entreprise sécurise une réponse adéquate à chaque niveau de la problématique.
Si les grands groupes internationaux peinent parfois à accélérer le tempo vers un Supply Chain Management efficient tant en termes de processus que d’organisation, la confrontation aux acteurs des marchés émergents les replace directement face à la nécessité de changer leur mode de pensée.
Implanté en Chine et en Inde et intervenant auprès de sociétés occidentales sur des problématiques d’efficacité opérationnelle, le cabinet KEPLER fait quotidiennement le constat de l’extrême mobilité et adaptabilité des acteurs locaux. Le Supply Chain Manager se retrouve plus que jamais en première ligne pour supporter les objectifs stratégiques de l’entreprise : développement international, compétitivité « end-to-end », flexibilité & sécurisation.